
Il a publié en 1988 avec son épouse Geneviève une oeuvre-somme, La Face de la terre (publiée chez Armand Colin), qui est l'une des pierres angulaires de la réflexion théorique française. Ils essaient d'y concilier un double programme pour la géographie : étude de l'humanisation de la terre (dans la droite ligne du programme écologique dessiné par P. Vidal de la Blache) à part égale avec un intérêt majeur pour l'organisation de l'espace produit par les sociétés (le programme spatialiste hérité de E. Ullman, W. Christaller et tant d'autres). La seule entreprise équivalente en français est celle élaborée par Roger Brunet dans Le Déchiffrement du monde (1989, rééd. 1999). La contribution théorique de Philippe Pinchemel à la réflexion sur l'espace des sociétés humaines, déjà esquissée dans des articles comme "De la géographie éclatée à une géographie recentrée" (1982), a beaucoup fait pour donner un soubassement global à l'analyse spatiale française. Sa réflexion sur la résilience des formes spatiales (semis de lieux, réseaux, trames d'occupation de l'espace) - qui se perpétuent par delà les systèmes socio-économiques qui les ont produites - est l'un de ses apports les plus intéressants à mon sens. Ses principaux articles ont été réunis en un volume Géographies. Une intelligence de la terre, publié dans l'excellente collection "Parcours et paroles" aux éditions Arguments.
Philippe Pinchemel était un homme d'une curiosité insatiable. Il y a un peu moins de deux ans, il était présent au dernier colloque Géopoint, consacré à l'avenir de la discipline. Il n'avait rien perdu de son alacrité intellectuelle. Ces derniers temps, on le savait très malade. La camarde semble avoir accéléré son pas. Pour cet intellectuel fidèle à ses convictions catholiques, gageons que ce dernier rendez-vous soit celui d'un juste.